Tourner, tourner, se tromper de route, faire demi-tour, poireauter à des feux rouges qui paraissent interminables, tourner encore. L'heure tourne elle aussi, il est 22h15 ou un peu plus et le car est censé partir dans un quart d'heure. Moi qui réfutais toute forme de pression pré-départ, la voilà qui pointe le bout de son nez. La gare routière de Gallieni se mérite, toute cachée qu'elle est dans les entrelacs de l'échangeur de la Porte de Bagnolet. C'eut été trop facile en vérité.

C'est rassurant de se dire qu'on va s'en prendre plein les yeux quand on voit la laideur du lieu!

Tout va bien, mon départ aura bien lieu. Mais la pression se fait un peu plus prégnante au fil des minutes qui le précèdent. En réalité, j'ai les miquettes (pour parler poliment) et puis j'ai jamais été fameux pour les au-revoir. Et puis, je ne pars que pour l'Espagne pour commencer. On a vu plus déstabilisant comme destination. La famille commence à charrier et elle a bien raison.

Dernier appel pour les passagers du car à destination de Madrid, une tournée de bisous et de câlins, le dernier siège disponible. C'était sans compter sur les chauffeurs facétieux qui, pour on ne sait quelle obscure raison, décident de ne pas honorer les règles de la ponctualité. Vous la sentez la pression qui grimpe toujours un peu plus haut?

Le temps d'une dernière taffe puis d'imprimer la marque de mes dents dans l'appuie-tête devant moi, les portes se ferment. Marche arrière, des bras qui saluent bien haut et le car qui s'engouffre dans la nuit parisienne...

Finalement, le départ acté, avec ces lumières qui semblent toutes neuves, ces rues qui ont la saveur de l'inédit et la route qui pourrait s'étendre à l'infini, elle n'est pas si moche que ça cette Porte de Bagnolet.